Jean-Claude Mourlevat

 

Après avoir enseigné l'allemand, monté et joué des pièces de théâtre, créé des spectacles clownesques, Jean-Claude Mourlevat s'est tourné vers l'écriture et la traduction de romans allemands. Il est l'auteur de plus d'une vingtaine d'ouvrages, principalement destinés à un jeune public. Il y a quelques années, j'avais découvert avec admiration L'enfant Océan ; en 2010/11, nous avons lu en classe La rivière à l'envers (Tomek)... 2011/12 a été l'occasion d'élargir notre connaissance des œuvres de cet auteur, qui aime bien placer parfois dans ses romans des clins d'œil relatifs à ses écrits antérieurs. La difficulté est que, pour repérer ceux-ci, il faut avoir lu les ouvrages dans l'ordre de leur rédaction, ce qui ne fut initialement pas mon cas...

 

Fiche biographique à destination des élèves (format pub)

 

Le 13 janvier 2012, dans le cadre des Assises Internationales du Roman, J.-C. Mourlevat est venu dans notre école rencontrer nos élèves. Une classe lui a présenté une pièce théâtre, la nôtre un journal télévisé inspiré de son œuvre (dont une interview d'acteurs sur fond de rivière à l'envers... :o) ). Après avoir répondu de bonne grâce aux questions posées par les élèves, J.-C. Mourlevat nous a lu un chapitre de La ballade de Cornebique (le fameux concours d'insultes) et nous a raconté une des nouvelles qu'il est en train d'écrire pour son prochain recueil. Il a ensuite mené un travail d'écriture avec la classe inscrite aux AIR 2012.

 

         

 

 

 

En mai 2012, nous avons réalisé un jeu de cartes reprenant des “clins d'œil” (le Robert admet également "clins d'yeux", mais je trouve ça moche) aux différents ouvrages de l'auteur. Il est téléchargeable et imprimable d'un clic sur la photographie ci-dessous (6,5 Mo) :

Le mardi 29 mai 2012, dans le cadre des Assises Internationales du Roman organisées par la Villa Gillet et Le Monde, nous avons eu le plaisir d'écouter des lectures de François Place, Évelyne Brisou-Pellen, Nathalie Kuperman et Jean-Claude Mourlevat (excusez du peu !). Au cours de l'après-midi, en compagnie de quatre autres classes ayant travaillé sur ses ouvrages, nous avons de nouveau rencontré notre désormais auteur préféré. Chaque classe lui a présenté, sous formes de mise en voix, saynètes ou lectures, le travail accompli cette année. Nous en avons profité pour lui remettre un exemplaire du jeu de cartes précédent. Il nous a fait le plaisir de nous raconter de nouveau, à la demande générale, l'histoire de Guillaume (qui sera présente dans son prochain recueil de nouvelles) et de répondre à nos questions... Nous avons ainsi appris qu'une des autres nouvelles de son prochain recueil portera sur un vieux bonhomme aigri, allergique aux fautes de Français (et particulièrement à celles des accords de participes passés) qui va décider de se venger d'une bien singulière façon d'un ministre qui maltraite la langue...

 

             

 

            

 

    

Merci à lui d'avoir autorisé la mise en ligne de la vidéo suivante de sa lecture devant 450 enfants...

Toutes mes excuses pour la qualité de la vidéo : nous étions placés loin...


 

Nous avons retrouvé, avec quelques élèves, Jean-Claude Mourlevat le lendemain, en compagnie de Tomi Ungerer, de Philippe Meirieu et de Timothée de Fombelle, pour écouter sa lecture musicale d'extraits de trois de ses romans : Le combat d'hiver, Le chagrin du roi mort et Terrienne. Auparavant, il nous a gratifiés d'une petite histoire qui connaîtra une longue vie dans les classes de l'école (je cite, de mémoire) : C'est l'histoire d'une maman souris et de ses quatre souriceaux, qui veulent sortir de leur gîte. Malheureusement, un gros chat ronronne paresseusement devant l'entrée. Les souriceaux sont terrorisés. Leur mère les tranquillise et leur demande de rester sur place. Elle sort, se plante devant le gros chat et hurle : "RRRrrr Ouaf !" Le chat se réveille en sursaut, bondit brutalement et s'enfuit sans demander son reste. La mère souris revient auprès ses enfants et leur dit : "Vous voyez, c'est utile de savoir parler une langue étrangère !"

 

    

 

    

 

La liste qui suit vous permettra d'y voir plus clair dans les œuvres de J.-C. Mourlevat, souvent traversées par une quête... Sa maîtrise de l'écriture lui permet de faire surgir tout un univers ainsi que d'apporter une épaisseur psychologique à ses personnages sans pour autant s'appesantir dans d'interminables descriptions : une qualité que j'apprécie ! ;o) Plusieurs de ses ouvrages prennent en compte la multiplicité des points de vue en se laissant raconter à plusieurs voix (L'enfant Océan, La rivière à l'envers, Le chagrin du roi mort). Son site Web apporte un complément d'informations bienvenu, tant sur sa biographie que sur ses textes... Les étoiles correspondent à un avis personnel totalement subjectif... Lorsque mon commentaire risque de dévoiler des éléments-clé de l'intrigue, il est précédé du terme “spoiler” et nécessite d'être surligné pour apparaître (je suis totalement allergique aux personnes qui racontent sans prévenir ce qui se passe à plus d'un tiers d'un livre ou d'un film !) J'utilise également ce système pour le repérage des "clins d'œil", histoire de ne pas gâcher votre éventuelle quête... Mes remerciements à deux amies et collègues, Guillemette et Emanuelle (inutile de m'écrire : il n'y a bien qu'un seul m ;o) ) qui, par les discussions que nous avons eues, m'ont incité à creuser dans la bibliographie de cet auteur.

 

 

1997

A comme voleur

Arthur, quatorze ans,  se retrouve seul dans son appartement. Sa mère vient de partir dans le Sud avec son dernier amant, son père a fui il y a belle lurette. Les 1 500 F (230 € pour les plus jeunes) qu'elle lui a laissés ont fondu comme neige au soleil. Les lettres de rappel s'accumulent. Arthur se rend donc chaque jour au Mammouth du coin pour se nourrir dans les rayons... mais cela ne lui permet plus de passer à la caisse de Florence, dont il est éperdument amoureux. Le seul moyen, pour payer ses courses, c'est de travailler... ou de se faire voleur...

 

  À partir de... 11 ans

 

  Mon avis... Dans les premières pages, avec les références à Mammouth, aux francs et à Cindy Crawford ou à d'antiques joueurs de foot brésiliens, on peut craindre que l'ouvrage ait vieilli mais, heureusement, ce sont les seuls éléments qui "datent", dans ce roman. Que faire, à part des bêtises, quand les parents sont (lourdement) défaillants ? Ces bêtises deviennent-elles justifiables quand elles sont faites "pour la bonne cause" ? On teste en tout cas la sympathie qu'éprouve automatiquement un lecteur pour le personnage principal d'une histoire, quels que soient ses agissements.

 

Coquille ? SPOILER p.63 : "Ils burent à la bouteille d'eau que Farid gardait dans un petit sac à dos vert comme son short, et qu'il avait posé à l'ombre d'un panneau indicateur." La présence du "et" me laisse plutôt penser que c'est la bouteille, et non le sac, qui est posée à l'ombre... Mais bon... C'est peut-être aussi un choix de rédaction...

             

1997

Histoire de l'enfant et de l'œuf

Une mère demande à son enfant d'aller chercher l'œuf pondu par leur poule afin d'en faire une omelette. La poule veut bien donner son œuf en échange de grain, qui faut aller chercher au moulin, auquel on ne peut accéder qu'en apportant une pelote de laine au chat du meunier, etc.

 

  À partir de... 6 ans

 

  Mon avis...

Une histoire a priori simple qui oblige à manier et à enchaîner les liens logiques entre ses divers éléments. Réservée aux cycles 1 et 2...

             

1998

Le jeune loup qui n'avait pas de nom

Assis sur une pierre au bord du chemin, un jeune loup pleure." À la différence de ses frères et sœurs, il n'a pas de nom. Un vieil homme qui passe par là l'invite à le suivre en lui annonçant que son nom est dans le sac qu'il porte. Il en fait autant avec chaque animal de la forêt qu'ils rencontrent ensuite...

 

  À partir de... 7 ans

 

  Mon avis...

 De belles illustrations de Jean-Luc Bénazet. Avec la structure répétitive de ce conte on pense être en terrain connu, mais la fin réserve une belle surprise (et se prête accessoirement à l'invention de nouvelles aventures par les élèves de cycle 2).

             

1998

Kolos et les quatre voleurs

Kolos est un géant qui vit dans une forêt et dont tout le monde a peur. Quatre brigands égarés décident de voler des choses dans sa maison et, suite à un enchaînement de méprises, se retrouvent en fâcheuse posture.

 

  À partir de... 7 ans

 

  Mon avis...

L'ouvrage, réédité, fait désormais partie de la série jaune de la méthode de lecture Ribambelle CE1. Lors d'une première lecture, j'étais complètement passé “à côté”, n'appréciant pas son caractère amoral, téléguidé, ni sa fin qui tombe comme un cheveu sur la soupe. Mieux valait, me semblait-t-il, se tourner vers le conte de Grimm Les musiciens de Brême qu'il rappelle irrésistiblement. S'ajoutait à cela le fait que je suis tombé sur une édition déplorable, avec des dessins excentrés sur de nombreuses pages, et que je ne suis pas certain que ce soit un problème d'impression ou de reliure. À la relecture, en classe, je l'ai trouvé “moins pire”, voire un peu poétique... Je révise donc mon avis en ajoutant une étoile...

             

1998

La balafre

Olivier à dû déménager avec ses parents jusque dans un hameau perdu, La Goupil. Il ne tarde pas à se rendre compte qu'une des habitations alentours n'est pas aussi abandonnée que ses parents le croient. Ce chien, cette petite fille qui l'appelle, existent-ils vraiment ? Parviendra-t-il à soutirer la vérité à l'inquiétante voisine, la mère Goret ?

 

  À partir de... 11 ans

 

  Mon avis...

Dans ce récit à la première personne, l'auteur mêle fantastique et enquête policière dans une histoire forte qui laisse le lecteur mal à l'aise de bout en bout. Quand un secret, caché toute une vie, devient trop lourd pour pouvoir être révélé sans casse...

 

  Clin d'œil :

SPOILER p.14, l'expression “J'avais un peu la tête dans le sac” rappelle irrésistiblement une remarque faite dans A comme voleur, p.93 : "Quand il se réveilla, à midi passé, il sentit qu'il avait la tête dans le sac. Farid aurait même dit la tête dans le cul, c'était son expression favorite chaque fois qu'il arrivait fatigué au carrefour."

 

             

1999

Le voyage de Zoé

Zoé, qui a six ans et ne sait compter que jusqu'à 6 prend le train pour aller à Pétaouchnok... Elle va rencontrer des personnages bien bizarres au cours de ce voyage (dont un contrôleur de l'état des chaussettes) et verra monter dans son wagon des petites filles bien surprenantes. Cette aventure lui permettra-t-elle de grandir ?

 

  À partir de... 5 ans

 

  Mon avis...

L'auteur nous a gentiment prêté son unique exemplaire de ce petit ouvrage de 16 pages, épuisé et introuvable. Le voyage de Zoé (un brin surréaliste), faisait partie de la méthode de lecture “CP Grindelire” et s'achève sur trois pages spéciales : un jeu des différences et un Quizz de lecture.

 

La couverture étant, jusqu'à présent, introuvable en qualité correcte sur le Web, je l'ai ajoutée à tout hasard, en bonne définition. Cliquez sur l'image...

             

1999

L'enfant Océan

Une histoire à vingt-quatre voix pour reconstituer les événements dramatiques qui ont jeté sur les routes les sept enfants de la famille Doutreleau, et qui ont conduit à la disparition de leur meneur, le petit Yann. Un enfant de dix ans, minuscule, qui ne parlait pas mais savait se faire comprendre des trois paires de jumeaux, ses aînés. Ni l'assistante sociale, missionnée auprès de cette famille "à problèmes", ni les gendarmes, ni les parents, bien sûr, ne purent empêcher le drame.

 

  À partir de... 10 ans... mais pour adultes aussi !

 

  Mon avis...

On gagnera, avant de débuter la lecture de ce roman, à relire le conte de Perrault “Le petit Poucet” auquel l'histoire se réfère ouvertement. Une œuvre fondamentale (si vous n'en lisez qu'une de J.-C. Mourlevat à destination du jeune public...) qui met en avant la psychologie des personnages tout en constituant un beau travail sociologique. Si vous appréciez ce principe d'histoires à plusieurs voix, je vous conseille Histoire à quatre voix d'Anthony Browne (pour les enfants) et l'excellente Horde du contrevent d'Alain Damasio (pour les adultes, en prenant la version qui comprend la "bande originale du livre" de préférence).

 

  Clin d'œil :

SPOILER Une référence, p.45 de l'édition Pocket jeunesse, à A comme voleur, dans le récit de Jean-Michel Heycken, écrivain : "Mon roman avait drôlement bien démarré. Un petit voleur de grande surface qui tombe amoureux d'une caissière. C'est l'été, la canicule, quelque part en Normandie. Plus j'avançais dans l'histoire et plus je le voyais, ce petit gars. Plus je l'aimais. En écrivant, parfois, j'en étais ému aux larmes."

             

2000

Les billes du diable

Tonio veut à tout prix aller en Australie. C'est une idée fixe. Il tient à voir de ses yeux les Billes du Diable. Il tempête, boude, puis finit par devenir raisonnable et par enterrer son projet dans une boîte... que son fils Jérémie retrouvera 20 ans plus tard. Que va-t-il se passer, à votre avis ?

 

  À partir de... 6 ans

 

  Mon avis...

Il y a bien une histoire mais... bof... un peu cousue de fil blanc. La “mayonnaise” n'a pas pris, en ce qui me concerne. L'ouvrage permet néanmoins de découvrir cette curiosité géologique australienne que sont les Devil's Marbles.

             

2000

Le petit royaume

Dans un petit royaume qui ne connaît que l'hiver, la sage dynastie des rois Holund a bâti une bibliothèque plus belle que son palais. Malheureusement, faute d'héritier, le pouvoir va revenir au chef des armées, Hagar, colérique tyran qui va faire interdire tous les livres, car il ne sait pas lire...

 

  À partir de... 7 ans

 

  Mon avis...

Un grand album, qui mériterait d'être plus connu. Les illustrations de Nicole Claveloux sont au service du texte (avec une maîtrise sidérante des expressions des visages en un minimum de tracés). J.-C. Mourlevat s'est visiblement fortement inspiré du début de ce conte pour écrire Le chagrin du roi mort. La maxime “La goutte d'eau creuse la pierre", qui sert de fil conducteur, donne à réfléchir...

             

2000

La rivière à l'envers

Tome 1 : Tomek

Tomek, jeune épicier qui s'ennuie ferme dans son village perdu décide de tout abandonner et de partir à la recherche de la rivière Qjar, qui coule à l'envers. À moins qu'il ne soit plutôt à la poursuite d'Hannah, la voyageuse qui lui a demandé s'il possédait dans son échoppe si bien approvisionnée un peu d'eau de cette rivière magique, censée empêcher de mourir celui ou celle qui en boit. SPOILER À travers la forêt de l'oubli, le village des parfumeurs, l'île inexistante et la montagne sacrée, nous suivrons son périple.

 

  À partir de... 10 ans

 

  Mon avis...

Une aventure passionnante, avec de véritables trouvailles SPOILER (la forêt de l'oubli, la prairie, les mots qui réveillent, les écureuils-fruits...). Un très bon ouvrage pour faire connaissance, en douceur, avec l'œuvre de J.-C. Mourlevat.

 

  Clin d'œil :

SPOILER Une référence, p. 75, à L'enfant Océan : "Passèrent ensuite six garçons jumeaux qui en portaient un septième dans un sac de toile. Tous marchaient vers l'ouest. – Salut les gars ! leur lança Tomek, hilare. Ils ne répondirent pas et le dernier lui jeta même un regard noir qui signifiait : "Tu veux mon portrait ?" – p. 28, "Ils entendaient claquer derrière eux les mâchoires des hommes-tigres, mais ils leur échappaient au dernier moment en se cachant sous un rocher." est sans doute à mettre en lien avec L'homme-cheval du récit Labour, dans Je voudrais rentrer à la maison, ou encore les hommes-chevaux et les hommes-chiens du Combat d'hiver.

 

             

2001

Regarde bien...

Par une belle matinée d'automne, Emma regarde la place depuis son balcon. Elle se pose mille questions et découvre qu'il suffit d'attendre pour obtenir les réponses.

 

  À partir de... 6 ans

 

  Mon avis...

Un peu "lèdge", quand on a goûté aux autres écrits de l'auteur. La "morale" de l'histoire donne cependant à réfléchir.

             

2002

La rivière à l'envers

Tome 2 : Hannah

Ce roman a pour originalité, non pas de présenter la suite des aventures de Tomek, mais de relater le vécu d'Hannah, la mystérieuse cliente de Tomek, au cours de la quête de ce dernier.

 

  À partir de... 11 ans

 

  Mon avis...

Une histoire à deux voix qui permet de prolonger le plaisir que l'on aura eu à lire les aventures de Tomek et de mieux comprendre certaines d'entre elles.

 

  Coquille : SPOILER p.130 "Les hommes buvait du vin, et moi de l'eau, parfumée aux pétales de menthe ou de verveine."

             

2002

L'homme qui ne possédait rien

En plein désert, un homme qui ne possède rien voit passer un chameau qui lui propose de l'emmener à la ville de Topka. L'homme refuse. Le chameau lui fait alors une proposition bien surprenante...

 

  À partir de... 8 ans

 

  Mon avis...

"Il y avait dans une oasis du désert un homme qui ne possédait rien." Le talent de l'auteur condensé dans la première phrase rythmée, nette et précise. L'histoire est belle et propose une sorte de mise en abyme qui laisse songeur. La preuve, si besoin était, que l'on peut faire un texte court et puissant.

 

Clin d'œil :

SPOILER L'idée principale s'inspire du chapitre IV des aventures d'Hannah, dans le tome 2 de La rivière à l'envers, lorsque celle-ci accepte de suivre Lalik dans la caravane, après qu'il lui a demandé : "Aimerais-tu savoir, Hannah, ce qui se passerait si tu venais avec nous ?" (p. 51) L'idée d'un personnage qui en attend un autre sur une colline, également présente dans "Hannah", rappelle aussi un épisode relaté par Bastibalagom dans Tomek (La rivière à l'envers - tome 1, p. 122).

             

2002

Je voudrais rentrer à la maison.

En 1962, Jean-Claude Mourlevat est entré en sixième, dans l'internat du lycée Blaise-Pascal. Une année marquée par une profonde tristesse et le désir permanent de rentrer à la maison (sans avoir à attendre le car du samedi après-midi). Une cinquantaine de moments choisis font revivre cette période noire de sa scolarité : rebellions de camarades courageux face à la violence du surveillant général, nourriture immonde menant à l'intoxication collective, professeurs mémorables (pour le meilleur et pour le pire)...

 

  À destination... des adultes.

 

  Mon avis...

Même si l'auteur est conscient que sa mémoire peut lui jouer des tours et l'amener à recombiner ou s'approprier certains souvenirs, tout sonne vrai dans ce recueil. On apprend sans regret non solum la destruction l'année suivante de l'établissement sed etiam sa reconstruction et une poursuite d'études plus heureuse pour le petit Jean-Claude.

             

2003

La ballade de Cornebique

C'est l'histoire d'un bouc, Cornebique, qui, par dépit amoureux décide de quitter le pays des Boucs avec son banjo sous le bras. Le voici, par monts et par vaux, errant sur les routes, jusqu'à se voir confier par une cigogne à bout de souffle un ravissant petit loirot en pleine hibernation. Celui-ci semble cependant attirer la convoitise des détestables Fouines. Cornebique parviendra-t-il à sauver son protégé de leurs terribles griffes ?

 

  À partir de... 9 ans

 

  Mon avis...

"C'est l'histoire d'un bouc..." Présenté ainsi, le roman n'est guère attrayant... Et pourtant... L'écriture est rythmée, les animaux pleins d'humanité, le regard sur les travers des hommes aiguisé (cf. SPOILER l'épisode de la course ou la rencontre avec le Docteur Lem, charlatan hors pair). En fin d'ouvrage, on découvre que la quasi totalité des nombreuses chansons jouées par Cornebique peuvent être retrouvées sur une compilation : "The very best of Woody Guthrie : Legend of American Folk Blues" et l'on se prend à regretter de ne pas avoir pu les écouter au cours de la lecture. Les titres sont téléchargeables ici ; on peut également les retrouver aisément sur Youtube. Une version audio CD abrégée, lue par l'auteur, est également disponible.

 

  Clin d'œil :

SPOILER La reprise, p.67, d'un terme particulier, lors de la Grande Course : "un hercule qui vient d'en balancer deux à la baille d'un seul coup d'épaule." voisine avec "Les deux autres gaillards doivent être jumeaux. Ils ont le même air de voyou, le même nez cassé et la même face d'abruti." Si l'ouvrage avait été écrit par Jose Carlos Somoza, ce passage serait clairement eidétique... L'enfant Océan débute, p.11, par le récit de l'assistante sociale qui ramène chez lui Yann Doutreleau, dont les six frères sont jumeaux, parce qu'il est venu au collège sans cartable : "– C'est le père qui y'a foutu à la baille. Traduction : le père a jeté le cartable dans le puits, ou dans la mare, enfin quelque part où il y avait de l'eau."

             

2003

L'homme à l'oreille coupée

Dans un port de Norvège, un vieil homme raconte, chaque fois qu'on lui pose la question,  une histoire différente pour expliquer la disparition de son oreille. Saura-t-on un jour la vérité ?

 

  À partir de... 9 ans

 

  Mon avis...

Un ouvrage qui se prête particulièrement bien à l'écriture collective en cycle 3... Imaginerez-vous d'autres aventures au cours desquelles ce marin a pu perdre son oreille ?

 

Cette nouvelle a été reprise dans l'ouvrage collectif “Champ de mines”.

             

2004

La troisième vengeance de Robert Poutifard

Robert Poutifard, maître d'école, prend enfin sa retraite après avoir subi des générations d'élèves tous plus insupportables les uns que les autres. Il a cependant décidé de se venger. Pas de tous, bien entendu, mais des trois garnements qui lui ont joué les tours les plus pendables. Tout va-t-il se passer comme prévu ?

 

  À partir de... 9 ans

 

  Mon avis...

Un prof aigri (avec quelque raison, il est vrai), des plans machiavéliques, une fin inattendue... Une bonne histoire que l'on gagnera à lire en classe après La ballade de Cornebique.

 

  Clin d'œil :

SPOILER Une référence à La ballade de Cornebique en p.73 (Folio junior) : "Il fit les cent pas, feuilleta des magazines, essaya de commencer un roman pris dans la bibliothèque. Il y était question d'un certain Cornebique, victime d'un chagrin d'amour. Le livre lui tomba des mains."

             

2004

L'homme qui levait les pierres

Chaque dimanche, sur la place d'un village, Ruper Oaza vient soulever une énorme pierre devant un public admiratif. Peio, douze ans, "maigre comme un poulet plumé", demande au colosse de lui enseigner la manière de lever les pierres. Les leçons seront bien éloignées de ce à quoi il s'attendait.

 

  À partir de... 8 ans

 

  Mon avis...

L'idée-force de l'ouvrage, SPOILER "On se sent si léger quand on les repose" n'est-elle pas une métaphore applicable à d'autres domaines ? Un bon débat philo en perspective... :o)

             

2004

Ouessant 59

dans le recueil

Bonnes vacances !

(p.217-224)

 

La narrateur se remémore l'été 1959 où, avec sa sœur et ses parents, ils s'est rendu en vacances sur l'île d'Ouessant, en Bretagne. Là, dans une petite crique, son père entreprit de réaliser un énorme château de sable qui suscita l'engouement des nombreux autres vacanciers, lesquels vinrent rapidement la rescousse...

 

  À partir de... 9 ans

 

  Mon avis...

Cette nouvelle, SPOILER qui n'est pas autobiographique, est issue d'un recueil qui en contient vingt-six autres et est vendu partiellement au profit du Secours populaire français. SPOILER J.-C. Mourlevat a su parsemer son écrit des petites anecdotes qui "font vrai", bien qu'il explique en conclusion que son écrit est une pure invention, les vacances se limitant pour lui, dans son enfance, à ne pas aller au lycée.

             

2004

Tenue correcte

dans le recueil

De l'eau, de-ci de-là

(p.147-152)

Jean-Philippe Muselier regrette amèrement d'avoir écouté ses enfants, d'avoir accepté leur cadeau d'anniversaire, d'être parti en raid accompagné dans le désert du Ténéré. Il regrette également d'avoir écouté ses compagnons de route qui l'ont incité à s'éloigner de quelques pas pour goûter à la solitude du désert. Le voici égaré. Perdu. Paumé. À moins que le petit point vert qu'il perçoit à l'horizon...

 

  À partir de... 9 ans

 

  Mon avis... L'histoire est courte, bien écrite, mais SPOILER je connaissais déjà la blague dont elle constitue un développement et je ne la goûte que moyennement. L'absurde de la situation finale et le titre qui en dit trop long ne sont guère de mon goût.

 

             

2005

Sous le grand banian

Deux sœurs, dans un village de l'Inde, discutent sous un vieux banian. La plus jeune, Lakshmi, aveugle, se laisse guider par son aînée, Shandra, au travers d'aventures très, très colorées.

 

  À partir de... 8 ans

 

  Mon avis...

Les illustrations de Nathalie Novi sont éclatantes, les aventures vécues feront forcément rêver les jeunes lectrices... jusqu'à la révélation finale ! À noter qu'un bel album d'Alain Serres et Zaü, intitulé Comment un livre vient au monde (Éditions Rue du monde) raconte l'ensemble du cheminement de cet album, de l'expédition du manuscrit en janvier 2004 à sa mise en vente le 28 septembre 2005.

             

2006

Le combat d'hiver

Dans un monde totalitaire, dominé par les partisans de La Phalange, quatre adolescents, Milos, Miléna, Bartolomeo et Helen, s'évadent des pensionnats dans lesquels ils sont retenus prisonniers et tentent de comprendre les raisons qui ont amené le gouvernement à les y enfermer. Leur cavale va les conduire sur des chemins bien différents, sans qu'ils soient sûrs de pouvoir un jour se retrouver. Ni de survivre...

 

  À partir de... l'âge “ado”.

 

  Mon avis...

Sans doute à ce jour le meilleur roman de J.-C. Mourlevat : contenu, rythme, inventivité (SPOILER les hommes-chiens, les hommes-chevaux). L'ouvrage a raflé de nombreux prix littéraires indiscutablement mérités. Si vous voulez lire un ouvrage de J.-C. Mourlevat sans pour autant avoir dans l'idée de l'utiliser en classe élémentaire ensuite, c'est sans conteste par celui-ci qu'il convient de débuter.

 

Clin d'œil : À la page  SPOILER 172 de l'édition de poche, on trouve une référence à L'Enfant Océan : "– Il demande combien vous avez d'enfants avec Hugo. Il radote... Attendez, vous allez voir... Elle baragouina une réponse dans la langue de son mari et pouffa de rire dans le torchon qu'elle avait gardé à la main. – Qu'est-ce que vous lui avez dit ? – Que vous en aviez sept. Tous des garçons. Et jumeaux par-dessus le marché !" Par ailleurs, les hommes-chevaux et les hommes-chiens sont peut-être une réminiscence du vécu de l'auteur au lycée (qui a visiblement inspiré l'Internat-Prison), relaté dans Je voudrais rentrer à la maison, à travers le récit intitulé Labour : "Henri T., interne, de terminale, est un grand garçon rouquin, fort comme un cheval. Alors la patronne l'emploie comme cheval." (p.37)

             

2007

La prodigieuse aventure de Tillmann Ostergrimm

 

réédité sous un nouveau titre en 2012 : "Le garçon qui volait"

Tillmann Ostergrimm ne tient pas à prendre la suite de son père à la tête de la tonnellerie familiale. Il va se découvrir par hasard un talent hors du commun : celui de pouvoir s'élever dans les airs. Aussitôt repéré par Dooley, un imprésario véreux, le voilà embarqué de force pour le cirque Globus, le "Grand Théâtre de l'Univers", dirigé par Draken, avare à la voix de stentor.

 

  À partir de... 9 ans

 

  Mon avis...

Outre le jeu de typographie qui renforce la manière dont parlent certains personnages, on notera que le titre des chapitres en dit à chaque fois long sur ce qui va arriver. Une habitude que la littérature avait (heureusement, à mon goût) perdu depuis quelques décennies. L'exercice a toutefois pour effet de plonger le lecteur en attente. On notera, chapitre SPOILER 16, une situation qui en rappellera sans doute d'autres, plus scolaires, puisque Tillmann se trouve obligé de moins bien réussir ce qu'il est pourtant capable de faire.

 

  Clin d'œil :

SPOILER L'idée d'un homme qui s'envole est le thème final de L'homme qui levait les pierres. p.170 "- Je crois que nous arrivons à l'océan... Ils se regardèrent, désemparés. S'ils arrivaient à l'océan, alors c'était bel et bien la fin de leur aventure." On aura reconnu une idée forte de L'Enfant Océan.

             

2009

Le chagrin du roi mort

Dans le minuscule royaume de Petite Terre, le bon roi Holund est mort. Deux enfants, Aleksander et son frère Brisco se rendent sur la Grand-Place principale où est exposé le corps du souverain défunt. Soudain, alors qu'Aleks se trouve à proximité du gisant, le roi, qui le prend pour son frère, lui parle et le met en garde. Le drame qui se prépare, pas étranger au fait que le roi n'ait pas de successeur désigné, va bouleverser la vie des deux jumeaux...

 

  À partir de... l'âge “ado”.

 

  Mon avis...

Un petit royaume nordique que l'on a l'impression de connaître, tant il est rendu réel. Nombre de personnages sont si intéressants que l'on se surprend à vouloir en savoir plus sur eux (les débuts de la fameuse sorcière Brit, le nain Halfred...) Si vous aimez les romans joyeux, passez votre chemin : ici, on ne rit guère et on souffre en silence dans un froid glacial. Le début de l'histoire rappelle immanquablement Le petit royaume, album pour enfants du même auteur. SPOILER La fin nous laisse présager une suite, non ?

 

  Clin d'œil :

SPOILER La rivière à l'envers : édition Gallimard jeunesse 2009 (p.367) On était déjà à contre-courant, tous les deux, à l'envers de tout, à l'envers de l'histoire aussi...

             

2011

Terrienne

Étienne Virgil, vieil écrivain stéphanois, rencontre Anne, une auto-stoppeuse de 17 ans, sur une route de campagne. La jeune fille est à la recherche de sa sœur, Gabrielle, qui a disparu un an plus tôt, emmenée de force dans un autre monde. L'écrivain va suivre Anne à travers le "passage", chemin brumeux à l'existence intermittente. Il découvrira un monde qui n'est pas sans rappeler 1984 d'Orwell, peuplé d'être froids, qui ne respirent pas et se nourrissent de mets insipides. Qu'est-il arrivé à Gabrielle ? Pourquoi a-t-elle été enlevée ? Virgil et Anne parviendront-ils à la retrouver ?

 

  À partir de... l'âge “ado”.

 

  Mon avis...

Ça se lit comme du Mourlevat : d'une traite. Et l'auteur n'hésite pas à transgresser un code de base de l'écriture romanesque d'une façon qui laissera le lecteur pantois (SPOILER M'enfin, Monsieur Mourlevat, où avez-vous vu que l'on tuait l'un de ses personnages principaux au début-même de sa quête !?). L'irruption du fantastique dans les alentours de Saint-Étienne doit être une première dans la littérature... ;o) On se régale et on attend le prochain roman...

             

2012

 

(2007)

Le garçon qui volait

 

réédition sous un nouveau titre de "La prodigieuse aventure de Tillmann Ostergrimm"

Tillmann Ostergrimm ne tient pas à prendre la suite de son père à la tête de la tonnellerie familiale. Il va se découvrir par hasard un talent hors du commun : celui de pouvoir s'élever dans les airs. Aussitôt repéré par Dooley, un imprésario véreux, le voilà embarqué de force pour le cirque Globus, le "Grand Théâtre de l'Univers", dirigé par Draken, avare à la voix de stentor.

 

  À partir de... 9 ans

 

  Mon avis...

Outre le jeu de typographie qui renforce la manière dont parlent certains personnages, on notera que le titre des chapitres en dit à chaque fois long sur ce qui va arriver. Une habitude que la littérature avait (heureusement, à mon goût) perdu depuis quelques décennies. L'exercice a toutefois pour effet de plonger le lecteur en attente. On notera, chapitre SPOILER 16, une situation qui en rappellera sans doute d'autres, plus scolaires, puisque Tillmann se trouve obligé de moins bien réussir ce qu'il est pourtant capable de faire.

 

  Clin d'œil :

SPOILER L'idée d'un homme qui s'envole est le thème final de L'homme qui levait les pierres. p.170 "- Je crois que nous arrivons à l'océan... Ils se regardèrent, désemparés. S'ils arrivaient à l'océan, alors c'était bel et bien la fin de leur aventure." On aura reconnu une idée forte de L'Enfant Océan.

             

2013

Silhouette

Dix nouvelles cruelles, voire parfois glauques... Une femme a la possibilité de jouer comme silhouette (figurante silencieuse) aux côtés de son acteur favori ; un ado part pour la première fois seul en colonie de vacances ; un homme, au soir de sa vie, décide de demander pardon à ceux qu'il a blessés ; une étudiante anglaise fait un stage linguistique (et plus si affinités) ; une famille prend enfin des vacances à Ouessant ; un sale bonhomme décide de faire respecter coûte que coûte l'accord des participes passés à l'oral ; Dom Juan a des trous de mémoire...

 

  À partir de... 14 ans (pas pour un jeune public, en tout cas)

 

  Mon avis...

 Ces dix nouvelles pour adultes qui ont pour point commun de mal se terminer (ce n'est pas un spoiler : c'est ainsi que l'auteur présente l'ouvrage). J.-C. Mourlevat avait eu la gentillesse de nous en raconter une lors de sa venue dans notre école en janvier 2013 (celle intitulée “Case départ”). L'exercice de style est réussi : chaque histoire est bien différente des autres. Si les neuf premières peut être lues indépendamment, il convient de n'aborder la mise en abyme de la dixième qu'après avoir découvert les autres. Cadeau bonus : les poèmes auxquels il est fait référence dans la nouvelle "Les jolis nuages".

 

  Clin d'œil :

SPOILER Jean-Claude Mourlevat nous a dit ne pas tenir à placer systématiquement des clins d'œil dans ses livres. On notera toutefois que la nouvelle “Ouessant” reprend, de façon nettement plus cruelle, “Ouessant” 59 publié en 2004. Pour ma part, je suis bien évidemment ravi que, p.188, il soit question de Federico García Lorca. Une coquille regrettable p.135 où une erreur d'orthographe volontaire... a été corrigée par le relecteur (ce qui casse l'effet attendu) !

 

             

2013

Sophie Scholl :

“Non à la lâcheté”

Les derniers jours de Sophie Scholl et de ses camarades étudiants du groupe de La Rose Blanche, de leurs actions de propagande à leur exécution par le régime nazi.

 

  À partir de... 12 ans

 

  Mon avis...

L'histoire est complétée par un dossier qui souligne l'importance de se rappeler que le groupe de La Rose Blanche n'a pas été le seul à combattre le nazisme. Diverses luttes, dont certaines toujours actuelles (Tibet, Pussy Riot...) sont également évoquées. L'ouvrage s'achève sur des documents iconographiques, dont  une photographie du mémorial Scholl, qui ne peut qu'émouvoir après la lecture de ce récit biographique.

             

2014

3 histoires

Compilation en un seul volume de trois romans :

- La ballade de Cornebique (2003)

- La troisième vengeance de Robert Poutifard (2004)

- L'enfant qui volait (ex-La prodigieuse aventure de Tillmann Ostergrimm 2007)

 

  À partir de... 9 ans

 

  Mon avis...

Oui... Non... Mais c'est très bien, ça, les rééditions... Mais pas quand ça nous prive de notre Mourlevat annuel. Ça, non ! Une réédition, ça doit venir en plus du reste, pas à la place ! ;o)

             

2015

Et Je danse, aussi

L'auteur de romans à succès Pierre-Marie Sotto reçoit par la Poste une enveloppe contenant visiblement un manuscrit. Redoutant qu'il s'agisse du premier texte d'un écrivain en herbe lui demandant son avis, il décide de le renvoyer sans l'avoir ouvert. Il écrit pour cela à l'adresse mail inscrite au verso de l'enveloppe... Démarre ainsi un échange avec Adeline Parmelan, qui va amener chacun à dévoiler sa solitude, son histoire et ses désirs.

 

  À partir de... l'âge adulte

 

  Mon avis...

Ce roman épistolaire, écrit à quatre mains avec Anne-Laure Bondoux, se dévore (trop) rapidement, malgré ses 280 pages. De belles trouvailles et une véritable intrigue tiennent le lecteur en haleine.

 

Morceau choisi...

"Dieu soit loué, vous y recourez peu, aux points de suspension, et c'est tant mieux. Je ne les aime pas, et d'ailleurs je vous mets au défi d'en trouver plus d'une quinzaine d'exemplaires dans tous mes livres. Ceux qui les utilisent me rappellent les types qui font mine de vouloir se battre, qui vous forcent à les retenir par la manche et qui vocifèrent : retenez-moi ou je lui pète la gueule à ce connard ! En réalité, ils seraient bien embêtés qu'on les laisse aller au combat. De même, ces obsédés des points de suspension semblent vous dire : ah, si on me laissait faire, vous verriez quelle superbe description je vous brosserais là, et ce dialogue percutant, et cette analyse brillante. J'ai tout ça au bout des doigts, mais bon je me retiens. Pour cette fois ! On a envie de leur suggérer à l'oreille : laissez-vous donc aller, mon vieux, ne muselez plus ainsi ce génie que l'on devine en vous et qui ne demande qu'à nous exploser à la gueule. Lâchez-vous et le monde de la littérature en sera sous le choc, je vous le garantis." (p.28-29)

             

 

2015

Les trois caramels capitaux

Après avoir mené une belle vie, le voilà qui se retrouve aux portes du paradis, devant saint Pierre. Ce dernier passe en revue toutes les bonnes actions du bonhomme et fronce les sourcils... Cette vieille histoire de caramels volés à l'épicerie, pendant que monsieur Soupot, le marchand, avait le dos tourné, ne risque-t-elle pas de remettre en cause l'accès à ce lieu merveilleux ?

 

 À partir de... 9 ans

 

  Mon avis...

La taille des caractères fait un peu peur au départ... à raison de 13 lignes par page et de quatre mots par ligne, on se dit que les quarante pages vont passer vite. Déjà qu'il a fallu supporter la nouvelle charte graphique de la collection “Petite poche” ;o). Et puis la “magie”  Mourlevat opère... Et l'on s'aperçoit que cette nouvelle peut servir de bon point de départ à de sacrés profanes débats philosophiques...

 

Morceau choisi...

"[...] Je suis arrivé très confiant à la porte du paradis [...]" (p.15)

             

2016

Mes amis devenus

Sur l'embarcadère du port d'Ouessant, Silvère Benoit observe le Ferry approcher. À son bord se trouvent ses quatre amis qu'il n'a, pour la plupart, pas revus depuis quarante ans. Une plongée dans les souvenirs du narrateur nous montre comment chacun d'entre eux, à sa façon, a marqué sa vie, l'a façonné. Tout comme Rutebeuf, Silvère s'interroge sur ce que Luce, Lours' et, surtout, Mara sont devenus... Jean, avec qui il est resté en contact étroit, a-t-il réellement eu une bonne idée de tous les réunir ?

 

 À partir de... l'âge adulte

 

  Mon avis...

La construction du roman, qui alterne flash-backs et retours à l'embarcadère, avec un rythme s'accélérant et un décalage progressif vers le présent devraient nous conduire vers quelque chose... Mais quoi ? On voit les chapitres défiler avec une petite appréhension : comment l'auteur peut-il s'en sortir alors qu'il ne reste que si peu de pages, sans nous laisser en plan au moment des retrouvailles ? Et puis la "magie Mourlevat" opère et l'on prend soudain conscience de la façon insidieuse dont le récit quelque peu nostalgique des aventures du jeune Silvère nous a amenés à nous attacher à ses personnages. Et la fin est là. Et l'on se dit : "Trop fort !"

 

  Clins d'œil :

SPOILERS La partie contemporaine de l'histoire se déroule sur l'île d'Ouessant, où Jean-Claude Mourlevat a déjà situé ses nouvelles "Ouessant 59" (2004) et "Ouessant" (Silhouette, 2013). On notera également p.138 une référence appuyée au conte du Petit Poucet, qui rappelle forcément L'Enfant Océan (1999).

 

Morceaux choisi...

"L'acquisition du langage se fait par imitation, paraît-il. Si tel est vraiment le cas, mon premier mot n'a pas été papa, encore moins maman, mais sans doute ouaf." (p.27)

"J'étais tombé ami comme on tombe amoureux". (p.58)

'[...] ses yeux dans les miens modifiaient ma chimie." (p.78)

'[...] en pensant à ces petits êtres délicieux que sont nos enfants et dont on doit faire un jour le deuil. On dit qu'ils changent, mais c'est faux, ils ne changent pas : à l'adolescence ils sont purement et simplement remplacés par d'autres personnes !" (p.161)

"Une belle histoire, une histoire sans méchants, sans trahison, sans règlement de comptes, sans conflit ! Dans un roman, ça ne passerait pas !" (p.199)

 

Références musicales

Procol Harum - A Whiter Shade of Pale

J. S. Bach - Erfreut euch, ihr Herzen, BWV 66

Moody Blues - Nights in White Satin

The Beatles - All You Need Is Love

David McWilliams - Days of Pearly Spencer

Demis Roussos - Rain and Tears

 

Coquilles (à corriger lors de l'édition poche ?)

"À quelques lancés de pierres" (p.21)

"sur l'issu de ce Quitte ou double mythique (p.155)

 

J'ai lu, traduit de l'allemand par J.-C. Mourlevat...

2008

(GER)

 

2011

(FR)

Rats

de David Fermer

Daniel est un jeune garçon, qui vit avec d'autres orphelins dans une pension, sur une petite île. Il n'a pas suivi son ami Mike sur le continent, et sans doute a-t-il bien fait, étant donné ce que subissent les enfants des rues qui s'aventurent là-bas. Voici qu'un jour Daniel perce un des secrets  de Hannes Andermann, le patron de la pêcherie qui régente l'île pour le compte de la dictature militaire en place. Un secret qui va bouleverser l'ordre établi...

 

  À partir de... l'âge “ado”.

 

  Mon avis...

Que dire ? Ça a la couleur du Mourlevat, l'odeur du Mourlevat... jusqu'à certains éléments qui pourraient passer pour des allusions aux écrits antérieurs de l'auteur (SPOILER le thème des ados dans l'orphelinat et de l'État totalitaire dyschronique qui rappellent forcément Le combat d'hiver, le lieutenant qui déserte que l'on reliera nécessairement au Chagrin du roi mort, le sauvetage dans la neige qui pourrait passer pour un clin d'œil à l'un des récits de L'homme à l'oreille coupée). Le livre plaira certainement à celles et ceux qui ont apprécié Le combat d'hiver. On pourra conserver en mémoire la dernière phrase de La Peste, d'Albert Camus : “Peut-être, le jour [viendra] où, pour le malheur et l'enseignement des hommes, la peste [réveillera] ses rats et les [enverra] mourir dans une cité heureuse."

             
             

À quoi reconnaît-on un véritable autographe de Jean-Claude Mourlevat ? Au petit oiseau qu'il dessine systématiquement, "bien mieux que François Place", a-t-il affirmé, en guise de boutade, alors qu'il était assis aux côtés de cet illustrateur et auteur au talent exceptionnel... :o)