Histoire de meubler une petite interruption de service de quelques jours, voici l'extrait d'un ouvrage que m'a conseillé une internaute (que je remercie au passage) : Pinocchio et Robinson, Pour une éthique de la lecture, d'Alberto Manguel (L'Escampette Éditions), dans lequel l'auteur analyse la place de la littérature dans notre société actuelle, à travers deux profils "prototypiques” de lecteurs.

"Il existe un ardent paradoxe au cœur de tout système scolaire. Une société doit impartir à ses citoyens la connaissance de ses codes afin qu’ils puissent y devenir actifs ; mais la connaissance de ces codes, outre la simple capacité de déchiffrer un slogan politique, une publicité ou un manuel d’instructions primaires, donne à ces mêmes citoyens celle de mettre la société en question, de découvrir ses défauts et de tenter de la changer. C’est dans le système qui permet à une société de fonctionner que gît le pouvoir de la subvertir, pour le meilleur ou pour le pire. [...] Un enseignant est toujours pris dans ce double nœud : enseigner de manière à apprendre aux étudiants à penser par eux-mêmes, enseigner en fonction d’une structure sociale qui impose sa loi à la pensée. L’école [...] [la plupart du temps] n’est pas un terrain d’entraînement où devenir un enfant meilleur et plus accompli, mais un lieu d’initiation au monde des adultes, avec ses conventions, ses exigences bureaucratiques, ses accords tacites et son système de castes. Il n’existe pas d’écoles pour anarchistes et pourtant, en un sens, tout professeur devrait enseigner l’anarchisme, apprendre aux étudiants à s’interroger sur les règles et les règlements, à chercher des explications aux dogmes, à faire face à des obligations sans céder aux préjugés, à exiger l’autorité de ceux qui sont au pouvoir, à trouver un endroit d’où ils puissent exprimer leurs propres idées, même si cela signifie une opposition et même, en définitive, l’élimination du professeur." (p. 24-26)

Pas que je sois arnarchiste, mais... ;o)